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Ciné culture
24 septembre 2012

Eraserhead (1977)

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ERASERHEAD

Genre : Fantastique, Horreur

Durée : 1h25 environ

Date de sortie : 1977

Réalisateur : David Lynch

Note sur Rotten Tomatoes : 90%

 

« Un rêve de choses sombres et troublantes », voilà la façon dont David Lynch décrit son premier long-métrage, Eraserhead. Sorti en 1977 après plusieurs années de travail difficiles avec un budget très modeste, le film garde l’influence de ses premiers courts-métrages surréalistes (dont il reprend certaines idées), tout en s’imposant comme sa première œuvre vraiment aboutie. Cela dit, le film est resté plutôt discret à sa sortie, ce qui n’est pas étonnant vu son originalité : surréalisme et grand public ne font pas vraiment bon ménage, et Eraserhead restera très « underground », ne passant que dans des petits cinémas à des heures tardives (à ce titre, il s’agit d’ailleurs d’un des films phares de ce que l’on surnomme le « cinéma de minuit »). Par le bouche à oreille, le film se fera peu à peu mieux connaître auprès d’un petit cercle d’amateurs éclairés ; il attira également l’attention de certains confrères de Lynch. Avec le succès des films suivants du réalisateur, Eraserhead gagnera en notoriété avec les années, s’imposant comme un film culte, qui exercera une grande influence dans le milieu ; Stanley Kubrick ira jusqu’à dire qu’il s’agit « du seul film qu’il aurait aimé réaliser », et s’en est inspiré au moment de tourner Shining. Malgré tout, il reste actuellement difficile à trouver en DVD, souvent vendu très cher.

Sans vous en dire trop, car c’est vraiment un film à découvrir par soi-même, on suit l’histoire d’Henry Spencer, un homme solitaire, introverti et assez étrange, qui vit dans une ville industrielle oppressante. Un soir, il se fait inviter à diner par la famille de sa petite-amie, Mary ; il y apprend que celle-ci a accouché d’un bébé dont il est le père. Après avoir été obligé de se marier avec elle, le couple emménage dans l’appartement de Henry avec l’enfant qui, né prématurément, a un aspect monstrueux, inhumain ; il se met à pleurer sans arrêt et une nuit, Mary, à bout de nerfs, s’en va, laissant Henry seul avec l’enfant sur les bras, qui tombe malade. Par la suite, Henry, vivant reclus dans son appartement, se met peu à peu à perdre la raison, s'égarant entre rêve et réalité, jusqu’à un final terrible.

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Eraserhead est avant tout un film psychologique, qui expose un thème que l’on retrouvera plus tard chez Lynch dans Lost Highway et Mulholland Drive : l’évasion par le rêve. On assiste ainsi à la descente dans la folie d’un homme tourmenté, à travers son quotidien morne et son imagination délirante ; il est souvent difficile de distinguer ce qui est réel de ce qui se passe dans la tête du personnage. A travers une narration tordue, des personnages inquiétants, un univers oppressant (l’esthétique en noir et blanc est remarquable) et des visions cauchemardesques, le film distille du début à la fin une ambiance dérangeante et oppressante. Mention spéciale à la bande-son, qui a bénéficié d’un grand soin, et ne fait qu’accentuer cette sensation de malaise que l’on peut ressentir (les pleurs du bébé, en particulier, ont de quoi glacer le sang).

Ainsi, le spectateur perd peu à peu ses repères dans cet univers bizarre, glauque et inhospitalier ; le film multiplie les scènes surréalistes en apparence inexplicables, qui sont profondément déstabilisantes (la fameuse scène du poulet, les passages avec les cordons ombilicaux, l’usine…), ce qui fait qu’il est souvent difficile d’interpréter ce que l’on voit. Ce bébé inhumain est-il réel, où n’est-il que le produit de l’imagination de Henry ? Qu’y-a-t-il derrière ces visions cauchemardesques, et qui est cette femme qu’il voit dans ses rêves ? Il y a beaucoup d’énigmes comme celles-ci, auxquelles vous n’aurez pas de réponse explicite ; le sens du film ne dépend que de votre interprétation, qui varie énormément d’une personne à l’autre (certains y ont même vu des allusions à la Bible, ce que je serai incapable de confirmer). Malgré tout, le film ne verse jamais dans les excès ; d’abord par sa durée assez modeste (environ 1h25) et son rythme assez posé (le réalisateur prend bien le temps d’installer son univers) ; mais aussi parce que l’on peut quand même y trouver quelques notes d’humour noir ; en particulier dans les dialogues, peu nombreux mais remplis d’ironie (notamment dans la scène du diner) ; ou encore dans les musiques, assez rares mais complètement décalées. La scène de la chanson, étrange mais étonnamment belle, offre aussi un court moment de répit.

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Eraserhead risque de laisser de laisser perplexe une bonne partie de son public ; beaucoup vont passer à côté du sens de l’œuvre, qui n’est jamais explicité. Complexe, mystérieux, rempli de sens cachés et de métaphores, le film est une véritable énigme qui ne se laisse pas résoudre facilement ; même pour les amateurs de Lynch, le premier visionnage est difficile. Mais si vous prenez le temps de vous plonger dedans et de l’apprécier comme il se doit, vous y trouverez un film étonnamment riche et profond ; chaque visionnage vous apportera de nouvelles interprétations sur les nombreux mystères de l’intrigue. Contrairement à ce que certains peuvent penser, Eraserhead, malgré toutes ses bizarreries, est riche en sens, là où d’autres œuvres surréalistes n’ont pas vraiment de propos (comme par exemple le célèbre court-métrage Un Chien Andalou de Buñuel). Pour un premier film, on y trouve une étonnante maîtrise et d’une incroyable recherche ; dès le départ, Lynch avait tout juste et a su imposer un style qui n’appartient qu’à lui, que l’on retrouvera dans ses œuvres ultérieures, en particulier Lost Highway et Mulholland Drive. Les acteurs, bien que peu connus, sont excellents ; Jack Nance est tout simplement brillant dans le premier rôle (on le recroisera par la suite dans les films du cinéaste, notamment dans la série Twin Peaks). Eraserhead est un film culte, auquel rien  d’autre ne ressemble, et croyez-moi, on ne ressort pas indemne d’une telle expérience. A vous de voir si vous vous sentez prêt à vous y aventurer, mais croyez moi, ça en vaut la peine ! Votre vision du cinéma pourrait en être complètement boulversée. En attendant, la bande-annonce ci-dessous a de quoi vous donner une petite idée de ce à quoi vous devez vous préparer...

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